Le bonheur dure peu de temps, mais, si on lui en laisse la place, il peut occuper un très grand espace.
"Le monde s’engouffre par les portes de mes yeux, je le laisse entrer et il m’emplit d’une matière aérienne, élastique et douce. Je suppose que c’est le bonheur, cette alliance de la lumière, du son et de la douceur de l’air. Le bonheur dure peu de temps, mais, si on lui en laisse la place, il peut occuper un très grand espace. Tandis que les enfants changent de vêtements avant de repartir vers l’école, je pense que le malheur n’est pas le contraire du bonheur. Il n’en est pas le revers, pas plus que la vie n’est une médaille qui présenterait alternativement sa face claire et sa face d’ombre. Le malheur ne s’use pas. Le malheur peut durer longtemps. Mais, si on lui interdit de s’étendre, on arrive à restreindre considérablement la place qu’il occupe. Il faut s’y employer bien sûr un peu sérieusement.Le malheur et le bonheur peuvent cohabiter. Il n’est pas donné à tout le monde de le savoir. Il n’est pas donné a tout le monde de forcer les portes de l’expérience.C’est ce que je pense alors que le chat sommeille dans la cuisine, qu’approche l’heure de la cantine et que les enfants reprennent en désordre le chemin de l’école."
LydieViolet Marie Desplechin La vie sauve